DSC_0148 Séquence 43c Séquence 43d
vidéo HDV, 7 minutes 20

avec la participation des membres de l’Harmonie municipale de Ferrière-la-Grande


Tel un cortège d’anges musiciens mais rebelles qui voudraient manifester leur mécontentement, l’Harmonie avance vers nous mais arrive de très loin, comme le tonnerre qui gronde par échos. Le caractère cacophonique ou « déréglé » de leur musique, comme si chacun jouait dans sa bulle alors même qu’ils avancent comme un seul homme, entre en contact métaphorique et « romantique » avec la nature luxuriante qui les entoure. Ainsi du ciel et de sa lumière qui semble accompagner le mouvement de la fanfare par alternance d’éclaircies et d’ombres. Ces troubadours désenchantés deviennent des oiseaux de bons et de mauvais augures, annonçant les humeurs du ciel comme les mariages et les deuils, faisant la pluie et le beau temps sur la vie en communauté.

Dieu sait quelle nouvelle ils sont venus annoncer cette fois-ci ; car leur marche fait d’abord l’effet d’une procession surréaliste où chacun retrouve son âme d’enfant, celle qui souffle dans l’instrument sans réfléchir au son qui en sortira. Mais l’innocence du souffle n’empêche pas la dimension collective et intergénérationnelle de faire pressentir la mélodie de l’Événement ; celle qu’on entend siffler en douce, à l’orée des grands mouvements de l’histoire, sans en reconnaître les notes. S’il est encore tôt pour prédire la destination de ces trouble-fêtes de l’Harmonie, ils rappellent par ailleurs tout un musée imaginaire où cohabitent les Musiciens du Caravage qui semblent n’en faire qu’à leur tête, les Musiciens tragiques de James Ensor qui forment un orchestre zoologique et la Sainte Cécile (patronne des musiciens) de Raphaël qui regarde le chœur des anges trônant dans le ciel alors qu’à ses pieds traînent des flûtes et des luths déglingués.


Texte écrit par Morad Montazami, historien et critique d'art